Légitime violence voir ce film 1440p

Si une cause est légitime, cela signifie qu’elle est justifiée et nécessaire à soutenir d’un point de vue moral, et qu’elle n’est pas simplement légale d’un point de vue juridique. Quant à la violence, on peut la définir comme étant l’exercice d’une force (physique, symbolique, ou psychologique) pour contraindre autrui. Les manifestations de violence donnent souvent lieu à des spectacles horrifiants de méchanceté, aussi la plupart du temps, les violences n’apparaissent pas comme légitimes, justifiées et nécessaires d’un point de vue moral. Cependant la question ici. « Existe t-il des violences légitimes. » nous invite à réfléchir et à nous positionner quant à la justification de certaines violences dans certains cas, et dans certaines circonstances.

La violence peut provenir de simples individus, comme de foules, elle peut être d’origine anarchique ou étatique, la violence est protéïforme dans ses manifestations. cela peut être des insultes, des coups, des humiliations de diverses sortes. L’imagination humaine est hélas apparemment sans limites dans ce domaine. La violence, c’est le plus souvent le droit du plus fort, mais le plus fort a t-il toujours raison. Par ailleurs, malheureusement, dans certains cas de figure, n’y a t-il pas d’autres solutions que la violence, que le recours à la force pour régler certains problèmes. La violence n’est-elle pas alors légitime, faute de mieux. Dire que la violence est toujours mauvaise n’est-ce pas niaiseux et non lucide, et même n’est-ce pas criminel certaines fois (paradoxalement parlant ).

PREMIÈRE PARTIE. NON, IL N’Y A JAMAIS QUASIMENT DE VIOLENCES QUE L’ON PUISSE QUALIFIER DE LÉGITIMES.

Premier principe, premier argument. En règle générale, on peut postuler qu’il y a plus de mauvaises raisons à la violence que de bonnes raisons. Sur quoi fonder ce principe. Tout simplement sur le fait que l’homme est un être de raison, et doté de la faculté de langage; Par conséquent, recourir à la violence est une réaction primaire, puisque l’homme est d’abord un être de parole, les mots sont plus appropriés, en général, à la gestion des relations entre hommes que la violence. La violence, en effet, est un mode de communication plus primitif que le langage, que nous partageons avec les bêtes.

L’homme est un être doté de corps et d’esprit, et nous serons tous d’accord pour affirmer que son aspect psychique est plus noble que son aspect physique. Aussi recourir à la violence, est un moyen sommaire pour régler les problèmes de communication entre êtres humains puisqu’ils flattent en nous des bas instincts (par exemple, pulsions d’agressivité et pulsions sexuelles). plutôt que des sentiments élevés comme la recherche de dialogue et la volonté d’empathie avec les autres.

Deuxième argument, deuxième principe. Comme la violence est un mode de communication, qui dans la plupart des cas est rudimentaire, c’est de plus, la solution de facilité pour régler un problème. Il n’y a pas beaucoup de recherche intellectuelle dans l’usage de la violence (sauf peut-être quand il y a raffinement dans la torture). Mais justement quand il y a torture, on dit « soumettre les individus à la question »; c’est dire au sens propre du terme, que la violence en général, soulève problème sans vraiment donner de solution réelle, et nous donne plus de questions que de réponses !

La violence, en général, est une réaction épidermique instinctive. Et une réaction spontanée et irréfléchie face à tel ou tel obstacle rencontré dans la vie concrète, ce n’est pas dans la plupart des cas, une réponse mûrement réfléchie. La preuve en est, c’est que les criminels ont tendance à s’acharner sur leur victime quand ils passent à l’acte. La décharge d’adrénaline déversée dans le sang du criminel le rend pulsionnel et sauvage à l’encontre de sa victime. La violence est ,en général, un défouloir, le stress interne d’un individu est évacué sur autrui. Ça soulage sans doute l’agresseur, mais certainement pas la victime !

Troisième argument. Par ailleurs, la violence est honnie dans la tradition religieuse comme étant non légitime puisque le premier commandement biblique est le fameux. « Tu ne tueras point « . L’interdit du meurtre est le fondement de la civilisation judéo-chrétienne; la violence est donc condamnée à la base de notre culture; vue de ce fait comme non-légitime dans la plupart des cas. Le meurtre est condamné socialement parlant, et il est de plus sanctionné juridiquement et pénalement.

Quatrième argument. La violence est d’autant moins légitime qu’elle est en général, un pouvoir instable. Ainsi Solon d’Athènes dans ses Élégies écrit. « Les Å“uvres de la violence ne sont pas durables ». Pourquoi la violence ne génère t-elle donc qu’un pouvoir instable. Parce que comme le remarque Rousseau dans le Contrat Social, ( au livre 1 chap 3. du droit du plus fort). « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître s’il ne transforme sa force en droit, et l’obéissance en devoir ». Ce n’est pas parce qu’on est le plus fort qu’on est dans son « bon droit ». Ainsi chez les bêtes où règne la loi du plus fort, c’est, en général, un mâle dominant qui « gouverne » ses homologues. Mais dès que ce mâle dominant devient vieux et sent sa force physique décrépir, un autre mâle vient en rival pour lui disputer le pouvoir sur le clan. La force physique procure donc un pouvoir non durable puisqu’elle rentre rapidement en rivalité avec d’autres forces physiques qui veulent dominer comme la première. La force doit donc en permanence prouver qu’elle est effective et susceptible d’agir sur les autres puissances physiques qui rentrent en contact avec elle. Le rapport de force est par nature instable puisqu’il risque en permanence d’être renversé. La force est donc politiquement faible; car la force physique n’a pas de légitimité en soi. Pour que la force physique soit durable, il faut qu’elle s’accompagne d’une charge symbolique qui asseoit sa puissance sur l’imaginaire des dominés. La force de la force, c’est surtout la force des illusions. Par exemple, le pouvoir d’un roi finit par devenir indiscuté car cela fait plusieurs décennies, voire plusieurs siècles qu’une même famille règne sur un pays.

Sans puissance symbolique qui relève le plus souvent des us et coutumes, la force d’un dirigeant est bien faible. la violence, la force physique qui contraint l’autre ne devient vraiment puissante politiquement parlant que quand elle est capable d’acquérir une puissance symbolique; par exemple, la royauté use du symbole du lys pour avoir pouvoir sur les esprits, les cÅ“urs et pas seulement être une pure puissance physique. La violence est comme l’a bien noté Jankélévitch,une « force faible » . car la force est une réalité physique, alors que le droit est surtout une réalité morale et symbolique; la force contraint tandis que le droit oblige. Pour que la violence physique acquiert de la durabilité, il faut qu’elle revête au moins un semblant de légitimité en devenant une puissance symbolique. par exemple, la puissance de l’empire romain s’illustrait symboliquement par la figure de l’aigle. Chez les êtres humains, la violence physique, pour perdurer doit se transformer en puissance symbolique sur les esprits et pas seulement agir sur les corps.

La violence est d’abord une puissance instable en elle-même, si elle n’est pas accompagnée d’une puissance symbolique et spirituelle, elle ne peut durer et se légitimer.

Cinquième argument. La violence est d’autant moins légitime aussi qu’elle est un processus qui devient vite irrémédiable, c’est une sorte de spirale infernale. La violence réclame la vengeance, et la vengeance appelle la violence. C’est pourquoi Jésus au moment de se faire arrêter, dit à Pierre qui a coupé l’oreille d’un romain. « Celui qui tue par l’épée périra par l’épée ». Pour Jésus, la violence est une non-solution, le signe d’un échec de la communication. Jésus ne veut qu’on use de violence que comme ultime position, aussi plutôt que de se laisser aller à la violence, Jésus demande à ses disciples de « pardonner jusqu’à 7 fois 77 fois ». La violence est un cercle infernal car elle s’auto-engendre elle-même, la violence crée des rancÅ“urs et des frustrations qui s’accumulent. Pour calmer la violence, en définitive, ce n’est pas la violence qu’il faut exercer, mais le pardon.

La violence, en effet, est une forme de jugement, pas un effort de compréhension de l’autre. La violence frappe et la violence juge. Et quand on se sent jugé, on juge à son tour. « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés » intime Jésus à ses disciples.

Sixième argument. La violence est non légitime aussi car elle est en général un défouloir qui se focalise sur une tête de turc. René Girard dans la Violence et le sacré, constate que dans tout phénomène de violence, il y a en général un individu qui cristallise sur lui les haines et les rancÅ“urs d’un groupe.
Quand un individu excelle dans un domaine, il a tendance à provoquer des jalousies, des rivalités. Les individus exceptionnels sont vite repérés dans un groupe et peuvent devenir des « têtes de turc » si certaines circonstances s’y prêtent.

La violence est donc non légitime, en général, d’autant plus qu’elle se déchaîne sur les individus les plus méritants à cause de la rivalité mimétique existant entre humains. Et une fois trouvé le bouc émissaire. l’éliminer devient un impératif pour le groupe.

La violence est ainsi liée au sacré dans la mesure où le bouc émissaire est une victime expiatoire de la violence du groupe. Le sacrifice du bouc émissaire permet d’exorciser la violence et de la calmer pour un moment. Le sacrifice du bouc émissaire est en quelque sorte un rituel, dont la fonction première est de transmuter le « tous contre tous », en « tous contre un » »et de ramener ainsi la paix pendant un certain temps au sein du groupe.

Mais le rituel du bouc émissaire est toujours un échec dans la mesure où quelques temps plus tard, la violence renaît dans le groupe et réclame une autre victime expiatoire.

Enfin septième argument. La violence qui paraît la moins légitime, et ce qu’on appelle « la méchanceté gratuite »; c’est à dire que certaines fois la violence s’attaque à un individu qui est extérieur à l’agresseur et à son cercle de vie. Mais la méchanceté gratuite a besoin d’une victime, alors c’est le premier individu qui se trouve » au mauvais moment au mauvais endroit » qui encaisse la violence. La violence ne saurait donc se justifier dans les cas de « méchanceté gratuite ».

Et la violence, hélas, se retrouve partout au niveau du comportement humain. La violence est d’autant plus fourbe qu’elle sait se montrer insidieuse comme dans le harcèlement moral dans le couple, ou dans le harcèlement moral au travail. la violence, en effet, peut être psychologique, et pas seulement physique. Ainsi dans le phénomène sociologique de l’exclusion, le sans domicile fixe est violemment mis hors du groupe par l’exclusion économique. Le non-partage des richesses est ainsi une forme de violence dans la mesure où une certaine partie de la population n’a pas la possibilité d’accéder aux richesses. La violence transparaît aussi dans la guerre de sexes.

Les hommes font plus facilement démonstration de violence physique que les femmes (c’est lié à leur taux de testostérone), mais les femmes peuvent aussi être violentes en paroles, ou sur la progéniture. Il n’y a donc pas un sexe plus violent qu’un autre, un sexe meilleur que l’autre. Ainsi Bernardin de Saint Pierre constate. « Les femmes sont fausses dans les pays où les hommes sont tyrans. Partout la violence produit la ruse «. La violence n’est donc pas l’apanage d’un sexe au détriment de l’autre, car si ce sont surtout les hommes qui frappent les femmes, ce sont surtout les femmes qui frappent les enfants. Le seul fait d’être le plus fort physiquement dans certaines situations suffit pour produire des phénomènes de violence. Certains individus semblent pacifiques tout simplement parce qu’ils n’ont pas l’occasion d’exercer un pouvoir sur autrui !

Huitième argument. La violence est aussi illégitime quand elle confine au raffinement dans la torture. Mais pour des penseurs comme Machiavel, dans le Prince, il n’y a pas d’autre alternative que la cruauté parfois, car elle seule, peut par exemple, arrêter les exactions du peuple quand il s’abandonne à ses pulsions anarchiques. Ainsi Machiavel trouve admirable le cas de césar Borgia (le fils du pape Alexandre VI) qui sut cristalliser toutes les rancÅ“urs sur Rémirro d’Orca. Rémirro d’Orca était un homme de main de César Borgia qui réprima les violences du peuple en Romagne. mais les expéditions répressives de Rémirro d’Orca avaient focalisé la haine sur lui. Aussi César Borgia fit tuer Rémirro d’Orca à son tour, quand les violences du peuple furent matées. Pour Machiavel, Rémirro d’Orca a été cruel, mais utile, et un prince doit savoir sacrifier certains individus afin de calmer l’appétit de vengeance du peuple. Une fois que Rémirro d’Orca a achevé sa mission de rétablissement de l’ordre par la violence en Romagne, il est lui-même sacrifié violemment pour exorciser les rancÅ“urs du peuple.

Chez Machiavel, la violence est un moyen pour maintenir le pouvoir en place. Pour Machiavel, en effet, le principal problème pour un prince est de conserver le pouvoir, et la violence est instrumentée à cette fin de conservation du pouvoir. Et pour Machiavel, cette violence doit se montrer cruelle quand il le faut! Ainsi Remirro d’Orca est décapité sur la place publique. « La férocité de ce spectacle fit tout le peuple en même temps satisfait et stupide ». Dans ce cas précis, Machiavel justifie deux fois l’utilisation de la cruauté dans la violence par César Borgia; premièrement en instituant Rémirro d’Orca comme son lieutenant en Romagne, et deuxièmement en le sacrifiant magistralement sur la place publique.

Or. il semble quand même problématique de justifier la cruauté, car c’est « la porte ouverte » à toutes les dérives possibles. Aussi. sans doute que dans certains cas, la violence est nécessaire, mais il faut quand même éviter de l’exercer avec cruauté. La cruauté qui accompagne certaines violences semble »Ã  tout le moins » injustifiable, donc illégitime !

De tout ce qui précède, on peut en déduire qu’il n’y a donc presque jamais de violences légitimes. Cependant, il ne faut pas enjoliver la réalité, et penser que l’on peut combattre uniquement la violence avec des bons sentiments. Sous-estimer le problème de la violence, est, en effet, dangereux. Ainsi Georges Sorel dans Réflexions sur la Violence constate que les gens les plus sanguinaires pendant la Révolution française ont souvent été des gens très optimistes; et d’autant plus inconscients qu’ils ne se sont pas rendus compte des grandes difficultés que présentaient leurs projets. « L’optimiste passe avec une remarquable facilité, de la colère révolutionnaire au pacifisme social le plus ridicule ». Et Sorel remarque que pendant la Terreur, les hommes qui versèrent le plus de sang furent ceux qui avaient eu le plus de rêves quant au partage social des richesses. « Ils se montraient d’autant plus irrévocables qu’ils avaient eu une plus grande soif de bonheuruniversel «. Tandis que le pessimiste « ne songe point à faire le bonheur des générations futures en égorgeant les égoïstes actuels ». La violence est donc un problème qu’il faut regarder en face et ne pas sous-estimer, d’autant que certaines fois, il existe des violences que l’on peut qualifier de légitime.

DEUXIÈME PARTIE. IL EXISTE, DANS UNE CERTAINE MESURE, ET DANS CERTAINES CIRCONSTANCES, DES VIOLENCES LÉGITIMES.

Premier argument. Dans les cas de légitime défense, la violence paraît se justifier. Ainsi dans la société judaïque primitive, il y avait la fameuse loi du talion. « Å’il pour Å“il. dent pour dent ». Si un homme commettait un méfait sur autrui, on devait ensuite pour réparer le tort, infliger le même méfait sur l’auteur de la violence. En calmant ainsi l’esprit de vengeance, on désamorçait le processus d’emballement de la violence. De tout ceci, il résulte que

a) La légitime défense peut donc être justifiée à un niveau individuel et permettre à la personne agressée de se protéger (élimination autorisée de l’agresseur). La légitime défense permet la légalité du meurtre dans certaines circonstances exceptionnelles.

b) La légitime défense peut être justifiée aussi à un niveau collectif, et c’est l’autorisation de la guerre. Quand un pays est envahi par un autre, il est normal que celui-ci riposte.

La réalité est souvent difficile et rend les plus hautes vérités boiteuses, alors parfois quand on ne peut faire autrement, on a le droit légitime d’user de violence à son tour.

Deuxième argument. D’un point de vue historique, la violence a pu être justifiée pour permettre certains progrès sociaux. Ainsi Marat écrivait dans un journal l’Ami du Peuple en 1793. « C’est par la violence qu’on doit établir la liberté, et le moment est venu d’organiser momentanément le despotisme de la liberté pour écraser le despotisme des rois ». Pendant longtemps, en effet, les rois gouvernaient même par droit divin. Ainsi pour passer d’une monarchie de droit divin à une République avec égalité de droits des citoyens, il a fallu bouleverser le paysage social avec une certaine violence. Il n’y avait sans doute pas le choix. quand l’ordre est nouveau, il faut bien qu’il s’instaure. Dans le même ordre d’idées, Kart Marx dans le Manifeste du Parti Communiste appelait à la « dictature du prolétariat », le temps d’installer les bases de la société nouvelle.

Mais la violence ne semble plus justifiée de nos jours, et le pouvoir politique qui userait de violences pour asseoir sa volonté serait inique.

Troisième argument. Cependant, si la violence se fait dans le but de maintenir la paix sociale, et qu’elle respecte les lois établies par la Constitution reposant sur les Droits de l’Homme. alors elle peut se justifier d’une certaine manière. Par exemple, des actes de terrorisme peuvent entraîner l’état d’urgence de la part de l’État. En ce sens, comme l’a remarqué M.Weber dans le Savant et le Politique. « L’État, c’est la violence légitime ». Dans toute société donnée, en effet, il faut des forces de répression pour maintenir l’ordre social comme l’armée, la police. Ainsi par exemple, lors de vagues de terrorisme, il peut y avoir un pouvoir plus étendu de perquisition chez les forces de police. perquisitionner chez quelqu’un est une forme de violence, mais on ne peut faire autrement dans le cas de terrorisme pour débusquer les potentiels agresseurs.

Quatrième argument. Même les hommes les plus pacifistes ont pu prôner la violence dans certaines situations, ce qui montrerait bien qu’elle peut être justifiée certaines fois. Ainsi Gandhi, grand adepte de la non-violence déclarait. « Là où il n’y a plus le choix qu’entre lâcheté et violence, je conseillerai la violence ». Si même les hommes les plus pacifistes ont dit qu’on pouvait user de violence dans certaines circonstances, c’est bien la preuve qu’il ne faut pas faire d’angélisme et récuser toute forme de violence.

TROISIÈME PARTIE. LA VIOLENCE EST UN PHÉNOMÈNE HÉLAS ÉTERNEL, QU’IL FAUDRAIT ESSAYER DE RÉGULER, COMMENT RÉGULER LA VIOLENCE ?

Premier argument. Dans une démocratie, normalement, la violence est maîtrisée car les forces de l’ordre exécutent des ordres légitimes. Mais il est évident que le pouvoir politique doit surveiller ses forces de l’ordre pour éviter les dérapages.

C’est pourquoi, il y a toujours enquête quand des forces de l’ordre sont intervenues et qu’il y a des blessés et des morts, soit du côté des représentants de l’ordre, soit du côté des opposants. C’est l’inspection générale des forces de police qui est l’instance qui permet de contrôler la force des forces de l’ordre.

Il est évident que toute force armée dans un État doit être contrôlée et être sanctionnée en cas d’incidents graves, sinon il y aurait risque d’abus de pouvoir. Car c’est un principe général que tout individu ayant un pouvoir, quel qu’il soit, a toujours tendance à en abuser.

Deuxième argument. Par ailleurs, pour que la violence soit limitée dans une société, il faut que les droits fondamentaux des individus ne soient pas bafoués. La déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen a posé les fondements de ces droits normalement inviolables comme la liberté de culte, la liberté d’opinion. Chaque individu a droit à un espace (psychologique et physique) vital basique. Quand cet espace vital n’existe plus ou prou, il y a violence. par exemple, dans les camps de concentration, il y avait une violence inouïe, car justement cet espace vital n’était plus respecté. Dans les sectes, et même dans certains ordres religieux, quand l’intimité de chacun est empiété, il y a violence.

En chacun de nous, comme l’a remarqué Freud dans Malaise dans la Culture, il y a deux forces qui s’opposent: Éros (pulsions de vie et érotisme), et Thanatos (pulsions de mort et destruction). Pour qu’il n’y ait pas violence, il faut que ces deux forces se limitent l’une l’autre. Mais cet équilibre est difficile à trouver, et quand une guerre est déclarée par exemple, ce sont les forces de Thanatos, qui viennent gangrenées et entamées tout le corps social.

Troisième argument. Dans la société humaine, c’est la violence symbolique qui doit être privilégiée par rapport à la violence physique. Partout où cela est possible, la violence symbolique doit être préférée à la violence physique. Par exemple, à l’école, les châtiments corporels n’existent plus, mais il existe toujours des punitions, comme des retenues ou des devoirs supplémentaires à faire pour les élèves indisciplinés.

L’homme est un être qui s’éduque. pas un être qu’on doit tyranniser. Dans l’éducation normale d’un être humain, la violence est surtout symbolique plus que physique. Par exemple, les enfants doivent apprendre dès l’école maternel à canaliser leurs pulsions pour obéir à la maîtresse et permettre une vie de groupe. Il est impossible d’enlever toute violence symbolique dans l’éducation, ainsi les enfants doivent apprendre à rester assis pendant plusieurs heures et à être attentifs pour pouvoir apprendre à lire. Rester assis pendant plusieurs heures est contre-nature pour un enfant en bas âge, mais pourtant c’est ce qu’inculque la société aux enfants. Il y a donc une sorte de violence insidieuse dans toute éducation qu’elle quelle soit, qu’on le veuille ou non. On force la nature humaine pour pouvoir en extraire ce qu’il y a de meilleur. Il y a de la violence symbolique dans toute éducation puisqu’il faut que l’enfant apprenne à canaliser ses pulsions et à être attentif pour être instruit. Il faut que l’enfant maîtrise ses envies pour obéir aux parents et aux enseignants, mais la violence symbolique, elle-même doit avoir des limites.

On ne peut pas enlever toute forme de contrainte dans l’éducation, mais il faut retirer la violence physique, cela est certain. Car un individu violent est en général un individu qu’on a violenté petit. La violence. le plus souvent, est la conséquence d’un trauma infantile. La violence a quasiment toujours une origine psychanalytique, c’est pourquoi la meilleure arme contre la violence reste l’éducation bien comprise des enfants.

Quatrième argument. Le christianisme est une religion qui a été civilisatrice justement parce qu’elle demande de renoncer à la violence. Jésus, a été la victime de violences épouvantables qui l’ont fait souffrir dans sa chair et son esprit. Mais justement Jésus dit qu’il s’est offert en sacrifice pour exorciser cette violence. Jésus est cet individu extraordinaire qui a fait de la violence non-légitime qu’il a subi, du suprême sublime.Et pour cette raison, il demeure le plus grand génie moral que la Terre ait porté.

En pardonnant à ses bourreaux, Jésus a désamorcé le processus irrémédiable de la violence, qui fait qu’une violence en appelle une autre. mais malheureusement, l’Humanité n’en aura jamais totalement fini avec la violence. Et justement la vérité est ce message qui arrive à s’imposer sans la violence.

Ce qui est certain, c’est qu’un message s’il est vrai et légitime n’a pas besoin de la violence pour s’imposer, et il finit par s’imposer parce qu’il est conforme à la raison, ainsi Pascal dans la lettre 12 des Provinciales écrit. « Tous les efforts de la violence ne peuvent affaiblir la vérité et ne servent qu’à la révéler davantage «. La violence est un abîme éternel dans la psyché humaine, c’est le dilemme impérissable entre la tentation de la puissance et le choix de l’amour. La violence, à chaque époque nous plonge dans la guerre métaphysique éternelle entre le Bien et le Mal.